#324 – Le prix à payer pour …

8 Jan
Voici le témoignage de mon accouchement, à Paris, qui m’a fait vivre l’enfer. Les conséquences de mon accouchement ont été longues et j’ignore combien de temps elles dureront. J’y pense encore douloureusement.
Merci de votre lecture.

Le 10 septembre 2013, lors de ma visite du 9ème mois, dans cette maternité parisienne qui se veut physiologique et naturelle, alors que, pour la première fois, on ne me fait pas le toucher vaginal systématique, dont j’apprends qu’il n’est en fait pas obligatoire, la sage-femme m’annonce que le bébé est encore haut, et me conseille de faire une séance d’acupuncture pour faire descendre le bébé et déclencher les contractions. L’acupuncture me va bien, j’en ai assez de dévoiler mon intimité à la ville entière, depuis plus de huit mois.

À peine sortie de la maternité, je prends rendez-vous pour le lendemain matin. J’arriverai chez l’acupuncteur après une nuit très courte suite à une longue insomnie.

Je passe toute la journée du 11 à sentir que quelque chose a bougé.

Le 11 à presque minuit, en me redressant pour aller me coucher parce que je suis extrêmement fatiguée de cette courte nuit et cette longue journée, je sens un liquide chaud couler entre mes jambes. Devant la tête que je fais, mon compagnon me demande, comme à chaque fois que je fais une drôle de tête depuis un mois : « Tu vas accoucher ? ». Cette fois-ci, je réponds que c’est bien possible. Je file aux toilettes et cela se confirme, j’ai perdu les eaux. Le liquide amniotique est clair.

Alors que je me dis que j’ai quatre heures devant moi avant de devoir partir, et que je vais en profiter pour dormir un peu, mon compagnon appelle la maternité, qui nous dit de venir immédiatement. Nous arrivons une heure et demie plus tard, après que j’aie assouvi ma petite lubie de soudainement me maquiller et vérifier mes valises.

À la maternité, on me place sur une table pour un monitoring après avoir vérifié ma dilatation : 1 doigt. Malheureusement, le bébé bouge beaucoup, il est très dur d’avoir un monitoring constant pendant 20 minutes. Il nous faudra deux heures et demie avant d’y parvenir. Je suis déjà épuisée.

On nous met dans une chambre dans les étages. Je ne sens pas les contractions et je m’endors aisément. À 7 heures du matin, de grosses contractions me réveillent. Je parviens malgré tout à me rendormir sur le petit bout de lit qu’il me reste – nous sommes deux sur un lit 1 place. À 11 heures, je me réveille pour de bon, avec toute la douleur des contractions. Je prends de l’huile de ricin pour accélérer l’accouchement, mais ça ne changera rien.

De 12h à 16h, mon compagnon et moi faisons des aller-retours dans les escaliers et le jardin de la maternité. Quand les contractions deviennent trop fortes, je vais prendre des douches chaudes qui me font oublier la douleur.

Vers 16h, les contractions sont vraiment rapprochées et douloureuses. J’appelle l’infirmière, qui confirmera le besoin de me faire redescendre en salle de naissance.

À nouveau, on me place pour un monitoring. Je dois rester allongée alors que seul le mouvement fait passer la douleur. Comme le bébé bouge toujours beaucoup, il faut encore longtemps avant d’en avoir un fiable. Je suis toujours à 1 doigt de dilatation.

J’explique à l’équipe que j’aimerais accoucher dans l’eau, que je n’ai pas le streptocoque B, et que l’eau chaude m’aide à gérer les contractions. Malheureusement, la salle de naissance avec la baignoire est occupée à ce moment-là, et l’équipe a un peu la flemme de me faire couler un bain dans une autre salle et de me transférer plus tard.

Après de longues minutes à insister, on me laisse finalement remonter dans ma chambre pour prendre une douche chaude.

La douche dure longtemps. Je redescends en salle de naissance à 19h, on me remet le monitoring. J’explique que je veux marcher. Qu’être statique est insupportable. Je demande le monitoring sans fil dont on m’a parlé pendant les séances de préparation à l’accouchement. On m’explique que les capteurs ont été balancés par erreur un mois plus tôt. Je ne tiens plus allongée. On me donne un ballon et très franchement ça ne change rien, je veux juste marcher.

On nous laisse marcher dans les couloirs entre les salles de naissance, et mon compagnon et moi déambulons pendant longtemps, en balançant nos hanches. Les sages-femmes nous surnomment « les danseurs ».

Malgré le mouvement, les contractions deviennent plus fortes et moins faciles à gérer. On veut me refaire un monitoring. Je fuis ces moments extrêmement douloureux qui disent toujours la même chose : tout va bien. Je ne sais par quel miracle, une sage-femme passera par ma chambre. Je lui explique à elle aussi que j’aimerais accoucher dans l’eau et qu’en attendant, j’ai mal, alors que l’eau chaude me fait du bien. Elle m’explique que les deux baignoires, qui ne sont pas des baignoires d’accouchement mais des baignoires de travail, sont libres depuis longtemps, et s’étonne que personne ne m’ait proposé de prendre un bain. Elle me fait couler un bain chaud et mon compagnon et moi nous retrouvons dans une petite pièce calme, à la lumière tamisée, où nous mettons notre musique et nos huiles essentielles à l’abri du corps médical. Ce moment est magique. Les contractions deviennent plus fortes mais mon ami me passe de l’eau sur le ventre quand elles viennent et je gère la douleur. Quand elles deviennent trop fortes, nous retournons marcher en balançant nos hanches, puis je reviens dans l’eau, puis nous remarchons, en alternant. Mais à un moment, je sens les contractions devenir vraiment plus douloureuses et plus intenses, et je vomis de douleur. À ce moment-là, je sens que je suis en train de m’épuiser, et que je vais peut-être devoir renoncer à mon rêve d’accoucher dans l’eau. J’annonce à mon ami que je vais demander un check-up, que si le travail a bien avancé, j’attendrai sans péridurale, et que sinon, je vais la demander.

Il est bientôt minuit et je suis à un doigt et demi. Je perds pied. Les sages-femmes me disent que c’est normal, mais je suis épuisée et je ne veux pas ne pas avoir la force de pousser mon bébé hors de moi. Ce que je crains plus que tout, c’est l’épisiotomie. Je la crains tellement que je l’ai fait noter dans mon dossier médical, et que j’ai annoncé à tout le monde que je préférais la déchirure. Alors, pour ne pas perdre cette force, je demande la péridurale. Tant pis pour l’accouchement dans l’eau, au moins je pourrai choisir ma position d’accouchement pour minimiser les risques de déchirure et d’épisiotomie, c’est dans la charte de cette maternité que l’on peut choisir sa position d’accouchement. L’anesthésiste vient me poser la péridurale. Il me pique la colonne vertébrale une douzaine de fois avant de mettre l’aiguille correctement, m’engueule parce que je me plains que cette aiguille me fait mal, et s’en va tout de suite après.

Quand la péridurale commence à faire effet, c’est le soulagement total. Je m’endors aussitôt. Malheureusement, la péridurale a ralenti le travail, on me propose de faire une séance d’acupuncture pour le relancer. La sage-femme acupunctrice viendra une heure et demie plus tard, et ça ne fonctionnera pas. On me rajoute de l’ocytocine dans la perfusion. Puis la douleur me réveille un peu plus tard, on me réinjecte une dose. Elle ne fait pas effet. Une deuxième dose ne fait pas effet non plus. Une troisième non plus. Épuisée, je me rendors entre chaque contraction, et je me réveille submergée par la douleur à chaque fois. Les sages-femmes vont voir l’anesthésiste, qui leur conseille d’augmenter les doses. Ça ne fonctionne toujours pas. De les rapprocher. Ça ne marche pas non plus.

Je finis par comprendre que la douleur est bel et bien réinstallée et que la péridurale ne fera plus effet. Je veux marcher, c’est la seule chose qui me fait du bien. Mais on me l’interdit, maintenant il faut un monitoring constant, on me propose le ballon qui ne fait toujours rien. J’arrive à m’échapper de temps en temps quand je vais faire pipi, et encore, je vois bien que ça fait chier l’équipe qui me propose à plusieurs reprises de me sonder alors que je suis parfaitement en état de marcher.

L’anesthésiste de garde change. Le nouvel anesthésiste comprend bien ma douleur, tente encore quelques injections de péridurale un peu plus fortes.

J’ai un répit d’une demi-heure. Je compte en profiter pour me reposer, mais impossible : l’équipe soignante a changé, et si les sages-femmes de nuit acceptaient que mon compagnon vienne les voir directement parce que la sonnette de mon lit ne marchait pas, ça n’est pas du goût de l’équipe de jour. Cette demi-heure de répit sans douleur, c’est précisément celle qu’ils choisiront pour envoyer un technicien pour réparer la sonnette de mon lit. On ouvre grand les rideaux, la chambre est remplie de lumière et de gens, impossible de me reposer.

Le bébé pousse sur mon rectum, je demande si c’est normal. On me dit que oui.

Il est 13h30. On m’explique que cela fait deux heures que je suis à dilatation complète. Je m’étonne de ne pas avoir été prévenue avant. Les sages-femmes me disent qu’il va falloir faire une manœuvre interne parce que le bébé « n’est pas dans le bon sens ». On ne me dira pas qu’il est en OS. Je dois être trop cruche pour comprendre, même si je connais l’intégralité des termes médicaux depuis mon arrivée – je suis bien renseignée.

L’anesthésiste revient. Il m’explique que ma péridurale a été posée n’importe comment, qu’elle est beaucoup trop haute et que c’est pour cela qu’elle ne peut pas faire effet. Il me dit qu’il veut la reposer, et faire en premier lieu une rachianesthésie puis laisser un cathéter pour la péridurale. Il me dit que cela peut couper le bloc moteur, mais ayant déjà eu une rachianesthésie pour une opération du genou, je sais que je peux gérer. J’accepte.

Je veux aller faire pipi. Je me lève, et je marche, certes avec l’aide de mon compagnon, l’infirmière derrière pousse la perfusion, mais je marche. À mi-chemin des toilettes, la sage-femme nous arrête : elle refuse que j’aille aux toilettes avec la rachianesthésie et préfère que je fasse pipi dans un pot. J’explique que je n’y arriverai pas, je suis pudique, je l’ai toujours été, j’ai besoin d’être dans une petite pièce fermée à clé pour pouvoir me laisser aller. Elle refuse, et propose qu’on vide la chambre. Je me retrouve seule sur mon lit d’accouchement, avec un pot sous les fesses, le sentiment que tout le monde peut entrer à n’importe quel moment, et bien sûr, je n’y arrive pas. « C’est pas grave, on va vous sonder. » Une humiliation nécessaire ?

On me donne le ballon pour que je me mette à quatre pattes pour voir si le bébé descend. Ça ne marche pas, je ne suis pas du tout à l’aise avec ce ballon qu’on essaie de me refourguer depuis le début. L’interne du service arrive pour la manœuvre interne, il a des mains gigantesques alors que la rachi commence à passer et que je n’ai pas encore eu de dose de péridurale. On m’en injecte une, mais j’ai peur. L’interne est un homme et ça me met mal à l’aise. Il me fait la blague la plus nulle de tous les temps : « Ah oui, j’ai vu votre dossier, vous êtes la patiente qui a fait préciser qu’elle n’aimait pas l’épisiotomie. Bon, ben du coup, je vous la fais tout de suite ? ».

Je n’ai pas beaucoup le sens de l’humour et cette fois-ci c’est trop. Je regarde les sages-femmes et je leur demande s’il est possible que la manœuvre interne soit exécutée par une femme.

La femme en question était déjà dans la salle, derrière moi, et prend très mal le fait que je refuse l’interne : « Ce n’est pas un homme ! C’est le DOCTEUR *** ! », comme si les médecins n’avaient pas de sexe.

Tout le service entre dans ma salle de naissance au moment de la manœuvre. Je suis à poil, avec un bébé dans le ventre, des contractions douloureuses, je vais prendre un avant-bras entier dans la chatte et en plus je suis sur la place publique ?!? J’explose, je hurle « On a besoin d’être 12 dans cette pièce ou quoi ? ». Les personnes inutiles repartent aussitôt, les autres se font discrètes et se collent au mur.

La manœuvre marche un peu mais pas totalement. La médecin commence à me parler sur un ton doucereux de césarienne. Je regarde le monitoring, et ma tension : tout le monde va bien. Je lui dis que je vais bien, que le bébé va bien, et qu’on peut attendre un peu de voir comment la manœuvre va continuer. Je lui dis que je voudrais éviter la césarienne, que la primo-infection du bébé doit se faire si possible par les bactéries « amies » du vagin de la mère et non les bactéries du milieu hospitalier. Elle me montre clairement qu’elle n’apprécie pas les arguments médicaux (« Je suis médecin, c’est moi qui sais, et vous, vous êtes là pour accoucher, pas pour réfléchir, d’accord ? Alors vous restez dans l’émotionnel là, l’hémisphère droit, et vous arrêtez avec le rationnel ! ») et me rétorque que si j’allaite, alors on s’en fout.

Elle insiste pour la césarienne « Ce n’est pas un échec, c’est juste une autre voie » et mon ami lui fait remarquer que « L’autre voie madame, on l’ouvre au scalpel ». Elle est agacée de notre insistance et déclare revenir une demi-heure plus tard. On m’installe sur le côté avec un pied dans l’étrier.

Là, je sais que j’ai une demi-heure pour que le bébé soit dans le bassin, car s’il est dans le bassin, elle ne pourra plus opérer.

Je suis devenue mon bassin, vraiment. J’ai fait des mantras, j’ai chanté, j’ai médité, j’ai visualisé.

28 minutes plus tard, la sage-femme entre dans la pièce, vérifie et m’annonce : « Le bébé est dans le bassin, et vous êtes vraiment grande-ouverte, il a toute la place de passer ».

2 minutes après, la médecin entre, et demande où j’en suis. La sage-femme lui dit que le bébé descend. Mauvaise nouvelle pour elle.

Soudainement, le besoin de pousser. Je me redresse.

La médecin m’appuie sur l’épaule. « – Je veux me redresser ».

« – Vous n’avez pas la force ».

Je lui dis que j’ai la force, que je veux me redresser, me mettre à quatre pattes ou accroupie. Elle me répond que je n’ai pas la force, qu’elle est médecin, qu’elle et l’équipe soignante savent mieux que moi, ils ont « une conscience plus générale » de mon état. J’insiste, elle me dit que ça suffit, qu’elle m’avait déjà dit d’arrêter de réfléchir. Elle explique que je me suis déjà mise à quatre pattes tout à l’heure, et que ça n’avait rien changé, comme si la situation avait quelque chose à voir. Comme elle voit que je ne lâche pas l’affaire, elle se tourne vers la sage-femme qui avait été si gentille avec moi depuis le début et me dit : « puisque vous ne voulez pas m’écouter moi, on va faire comme la sage-femme le dit : qu’en dites-vous, N. ? », comme si une sage-femme allait s’opposer à la cheffe de service…

J’arrête de lutter, je suis en position gynécologique, je me sens humiliée, vulnérable. Je pousse. Je pousse encore. Apparemment je pousse bien. Mais pour une raison que j’ignore, on décide de me faire faire un test pour savoir si je pousse mieux en soufflant ou en bloquant ma respiration. À partir de là, on m’ordonnera de respirer, bloquer, pousser, respirer, bloquer, pousser, alors que pousser est un besoin vital et que je sens bien mon corps capable d’y parvenir tout seul.

Le bébé s’arrête dans le bassin. Je veux me redresser, alors elle demande à l’infirmière de mettre ses coudes dans mon ventre « pour empêcher le bébé de remonter entre les contractions ». Super pour la détente progressive de mon périnée ! Elle veut prendre les forceps. Je refuse, je ne veux pas d’épisiotomie. Elle me dit que ça n’est pas obligatoire, encore moins avec la ventouse. J’accepte la ventouse parce qu’on m’avait dit que ça ne servait qu’à redresser la tête du bébé, et qu’il faisait le reste du travail tout seul.

Mais en fait, elle tire dessus. Je sens le bébé descendre incroyablement vite. Elle essaie de remettre un coup de ventouse, mais la ventouse lâche. Le bébé continue à descendre, je touche sa tête. Il est juste au bord.

Il ne sort pas. On me dit qu’il va falloir faire une épisiotomie. Je ne veux pas. On me dit qu’il le faut. Je refuse. La médecin insiste. Je pleure que je ne veux pas. Elle hurle que ça suffit. Je continue à dire que je ne veux pas, que je veux encore pousser. Je jette un œil aux constantes vitales du bébé, il va bien. Voyant que je refuse, ils tentent de pousser mon compagnon à me faire accepter. Ils lui font peur, lui font croire que le bébé va mal. Et lui se penche vers moi : « Cécile, il faut qu’il naisse ce bébé ».

La plus grande solitude du monde. Je pleure que je ne veux pas. Je veux me redresser. La sage-femme coupe.

J’attrape le bébé et le pose sur mon ventre. Je n’ai même pas regardé si c’était une fille ou un garçon. On vient de me découper.

Agpar à 10 : ce bébé va très bien. Il n’y avait pas d’urgence. On m’a coupée. Découpée. Comme un vulgaire bout de viande, je n’avais pas de consentement à donner. Sauf que l’épisiotomie est hémorragique.

Tout à coup on décide que le bébé respire mal et qu’il faut l’emmener se faire aspirer. En fait, il faut sortir le bébé et le papa parce que mon épisiotomie est hémorragique, qu’on m’a donc fait une délivrance artificielle, que j’ai fait une rupture placentaire et que je suis donc en train de faire une hémorragie de la délivrance. Et hop, une petite révision utérine, c’est cadeau. Cependant, je souffre sans savoir ce qui se passe, tout ceci je l’apprends à la lecture de mon dossier médical, des semaines plus tard.

On me recoud avec une injection mais je sens les points. Pendant qu’on me recoud je demande combien il y a de points. La sage-femme reste vague, prétextant qu’ « on ne peut pas vraiment compter comme ça ». Elle ne me regardera plus jamais dans les yeux. La médecin, ce monstre, me dit que cette épisiotomie est « toute petite ». Le lendemain je verrai les 13 points externes et les infirmières seront impressionnées par la « grande taille » de cette coupure. Pourquoi m’avoir menti sinon par sadisme ?

Et finalement, la sage-femme, avant que mon bébé ne revienne : « je vais vous faire un toucher rectal », parce que je n’avais pas été assez humiliée jusque là. Mon bébé revient avec son papa, on me le pose sur le ventre. Il tète goulument. Je n’arrive pas à saisir la magie de ce moment, on m’a découpée. Je voulais accoucher dans la position de mon choix et ne pas subir d’épisiotomie, mais on ne m’a pas laissé le choix.

Pendant que le papa remonte chercher des habits de bébé, on teste ma glycémie, je suis à 10. On m’explique que je ne vais pas avoir besoin de transfusion. Je m’étonne que cela soit même une option envisagée, personne ne m’avait dit que j’avais fait une hémorragie. Je le saurai quelques semaines plus tard en lisant mon dossier.

En sortant de la salle d’accouchement pour remonter dans la chambre, nous croisons la médecin. Elle vient nous voir et nous dit qu’elle a eu raison d’être sèche, qu’il le fallait. Pourquoi ? Toujours pas d’explication. Je suis censée accorder une confiance aveugle au corps médical sans même le remettre en question. Puis elle me dit : « une épisiotomie, c’est le prix à payer pour être une fille jeune et en bonne santé ». Le prix à payer, merci madame.

Nous montons dans la chambre et nous sommes dévastés. Je pleure pendant des jours et des jours. Je ne trouve aucune joie dans cette naissance, aucun bonheur. Je revis sans cesse la scène, j’imagine comment elle aurait pu se passer autrement, je rêve de vengeance, je me cloître dans mon incompréhension, j’interroge tout le monde et personne ne comprend. Mon compagnon est dévasté aussi. Il ne sait pas si je parviendrai à m’en relever. L’incompréhension entre nous est totale. Je lui en veux de m’avoir dit que je devais accepter de me faire découper. Il faudra tomber le troisième jour sur une puéricultrice merveilleuse pour que l’on nous écoute vraiment. Et des mois pour que mon compagnon m’explique qu’il m’a dit ça pour savoir quoi faire, pas pour écouter les médecins.

Je ne supporte pas les anti-inflammatoires. Alors je souffre de mon épisiotomie. Je peine à me lever, à m’asseoir, à m’allonger, à marcher. La douleur physique ajoute à la douleur morale.

Le quatrième jour, une infirmière me fait la morale parce qu’elle ne comprend pas bien pourquoi je me plains. « Une déchirure, ça, c’est traumatisant. Pas une épisiotomie ». Elle me dit que dans cette maternité, on ne fait des épisiotomies que quand c’est nécessaire, et « on n’en fait presque pas, on en fait que 25% ». Je lui demande si une femme sur quatre c’est « presque pas ». Je suis blessée qu’elle ne comprenne pas mon traumatisme, qu’elle nie ma douleur.

La cicatrice est grande, j’ai peur d’aller à la selle et que ça tire sur les fils. Je serai constipée pendant 4 semaines, et m’en tirerai avec des hémorroïdes que l’accouchement m’avait malgré tout épargnées.

Je quitte la maternité avec l’impression de quitter l’enfer. Malgré ça, je pense à l’accouchement tout le temps. Je pleure plusieurs fois par jour, je revis la scène en permanence. Chaque moment de solitude fait monter les larmes. Je ne comprends pas comment j’arriverai à dépasser ça un jour.

La cicatrice me fait mal pendant des semaines.

Je demande mon dossier médical. On me l’enverra en retard parce que la médecin a demandé à rajouter des annotations.

Mon compagnon et moi reprenons les rapports à tout juste six semaines. C’est atrocement douloureux.

Le lendemain, j’ai rendez-vous à la maternité pour la visite de suite de couches. La médecin sur laquelle je tombe ne trouve pas mon dossier. Elle part le chercher, ne le trouve pas, et va donc voir la médecin qui a assisté à mon accouchement. Elle revient confuse, me parle directement de mon épisiotomie alors que je n’ai toujours rien dit, et me déclare « vous savez, on avait vraiment besoin de vous la faire ». Je demande pourquoi, elle me répond que sinon, je risquais une déchirure. Je réponds que j’aurais préféré la déchirure, « ah non, vous ne pouvez pas préférer ça ». Puis je lui dis qu’on ne m’a pas parlé de déchirure pendant l’accouchement de toute façon. Un éclair de panique passe sur son visage. « – Ah bon, on vous a parlé de quoi ? », « -De rien, on m’a juste dit que le bébé devait naître ». Elle me dit que c’est vrai, que l’expulsion a duré 38 minutes, qu’à partir de 20 minutes c’est dangereux pour le bébé. Je suis étonnée d’apprendre ça, je ne l’ai jamais lu nulle part. Je lui dis que sa collègue m’a empêchée d’accoucher dans la position de mon choix, elle me répond que c’est normal, qu’on ne peut accoucher que sur le dos. Quand je lui rétorque que ça n’est pas du tout ce que l’on m’a appris pendant les séances de préparation à l’accouchement, ni la charte de la maternité qui l’emploie, elle invente carrément un bon gros mensonge et me dit qu’on peut se mettre dans la position qu’on veut pendant le travail, mais pas pendant l’expulsion. Comme cette médecin est la médecin-coordinatrice de la maternité, je sais que je ne pourrai même pas saisir la CRUQ de l’établissement. J’ai beau pleurer toutes les larmes de mon corps dans son bureau, elle ne me parlera pas de la dépression post-partum. Elle veut juste que je sorte de son bureau, et couvrir sa collègue.

La semaine suivante, je commence la rééducation du périnée. J’ai choisi une sage-femme libérale à côté de chez moi. Je lui explique mon accouchement. C’est une sage-femme de la vieille école, elle ne comprend pas que je puisse me plaindre d’une épisiotomie. « Moi j’en ai eu une pour tous mes accouchements, et ça va très bien. » Quand elle me demande si j’ai mal aux rapports et que je réponds que oui, elle rétorque « c’est dans la tête ».

Après 6 séances à souffrir le martyre (« votre périnée répond bien, mais la sonde vous permettra de voir votre score ! » Sympa les chocs électriques sur la cicatrice), je me rends compte que je souffre à l’entrée du vagin mais que je ne sens rien derrière. La sage-femme m’explique que l’épisiotomie m’a coupé les nerfs, que c’est normal, que parfois ça ne repousse pas « mais ce n’est pas très grave, ce n’est pas la partie sympa du vagin ». Déprimée, je vais voir ma gynécologue habituelle, celle qui a suivi ma grossesse jusqu’au septième mois. Je lui raconte mon accouchement et elle est navrée. Elle regarde ma cicatrice et me dit que certains fils à l’intérieur se sont mal résorbés, que j’ai une boule à l’entrée du vagin et que c’est cette boule qui est douloureuse. Elle m’annonce aussi que je fais une dépression post-partum. Pour la première fois, quelqu’un me dit que je ne vais pas bien, et que cet état n’est pas un état normal, et qu’il est possible d’en sortir. Elle m’envoie voir une sage-femme spécialisée dans les douleurs périnéales et un psychologue. La sage-femme diagnostique des névromes et me propose de les traiter par courant antalgique.

Nous sommes à trois mois de l’accouchement, et pour la première fois, j’ai l’impression que je vais aller mieux un jour, même si j’en doute souvent. Je pense toujours à l’accouchement tous les jours, je revis la scène, je pleure souvent.

Aujourd’hui, j’ai envie de me battre, de porter plainte contre cette femme, de prévenir les autres femmes enceintes. C’est peut-être un début.

26 Réponses to “#324 – Le prix à payer pour …”

  1. Lucie 8 janvier 2014 à 15 h 01 min #

    Ho punaise…Sa fait froid dans le dos! mon accouchement a été une cata pour moi et alors que je commence doucement a me mettre l’idée d’un deuxième (après 19mois quand même) quand je relis des choses comme ça je me dis que s’est une mauvaise idée! bon courage et j’espère que cette bonne femme sera punie!

  2. Lisa 8 janvier 2014 à 15 h 24 min #

    C’est vraiment écoeurant de lire des choses pareilles ! Ce que cette femme vous a fait est inimaginable. Je ne peux m’empêcher de repenser à ce qu’a écrit Frédérick Leboyer : tous les soignants qui travaillent en maternité ont un compte à régler avec la naissance et je pense que parfois, certains dérapent complètement. De plus, vous leur avez montrer que vous ne vous laisseriez pas faire, que vous connaissiez votre corps et le sujet, elle a vu son pouvoir si chèrement acquis durant ses années d’études voler en éclat et elle ne l’a tout simplement pas supporter.
    Je vous souhaite bon courage et, peut-être, si vous le souhaitez, la possibilité de vivre une seconde naissance dans le respect, sans traumatisme.

  3. Stéphanie 8 janvier 2014 à 15 h 26 min #

    C’est sur ça fait froid dans le dos !!! Mon accouchement a été un peu similaire au tien… et je commence réellement à m’en remettre 2 ans après… Mais une chose est sure si tout se passe bien je ferai tout pour que mon deuxième bébé ne naisse pas en maternité mais dans la chaleur de notre foyer !!!
    Je ne supporte plus la toute-puissance du corps médical…Et leur façon de nous prendre pour des débiles !!!
    Bon courage à toi.

  4. Marie 8 janvier 2014 à 16 h 16 min #

    Ma pauvre, j ‘ai vraiment beaucoup de peine en lisant ton témoignage.
    Je suis bien triste de tout ce que t’a fait enduré le personnel de cette maternité et j’ai l’impression que le plus difficile à été les humiliations, ces actes médicaux douloureux (et on se pose la question de leur nécessité), ce bras de fer que l’accouchement en lui-même.
    J’ai été interpellée par ce récit car j ‘ai vécu des choses similaires dans une maternité parisienne réputée physio. Le plus troublant, c’est qu’elle a également une baignoire d’accouchement et deux pour le travail…. Je me pose donc la question de savoir si ce ne serait pas la même et pourquoi pas la même médecin qui avait absolument odieuse avec moi.
    Ton témoignage m’a émue et a surtout ravivé la rancœur que je lui porte.
    Ta dernière phrase me fait écho et je serai prête à entamer des démarches s’il s’agissait de la même personne. Comment est-ce possible de rentrer en contact???

    • liejulie 8 janvier 2014 à 17 h 06 min #

      Bonjour Marie,
      J’ai prévenu Cécile que vous vouliez la joindre.
      N’hésitez pas à tenir l’équipe du défi informée, si vous faites des démarches.

      Belle fin de journée,
      – Julie

  5. Marie 8 janvier 2014 à 17 h 09 min #

    Merci, c’est très gentil.
    Je n’aurais peut-être pas osé si je n’avais pas vu ce témoignage et sans cette superbe initiative que vous avez réalisé.

  6. Matilde 9 janvier 2014 à 16 h 28 min #

    j’ai été très touchée par votre témoignage. Vous avez été très forte, courageuse, et sûre de vous. Il fallait vraiment le vouloir pour briser tout cela et l’obstétricienne a été loin dans l’acharnement pour y arriver… quel tristesse d’avoir saccagé votre accouchement ainsi ! Bon courage pour porter plainte, c’est mérité de le faire en tous cas. J’espère que vous rencontrerez aussi des bonnes personnes pour vous aider à vous en remettre.

  7. céline 13 janvier 2014 à 11 h 32 min #

    C’est navrant, j’ai eu des déboire aussi qui ont durés des mois pour l’allaitement et on m’a dit des dixaines de fois d’arreter d’allaiter alors que je voulais allaitrer jusqu’a ce que l’enfant arrete de lui meme.
    Aucun soutien a l’hopital.
    Je n’ai pas encore été les voir mais j’ai envie de le faire.
    Ils ne conniassent rien au fond et nous font du mal.
    Tu as été très courageuse pour oser parler tout de même pendant ton accouchement et d’avoir tenue bon.
    Du restes, tu n’y est pour rien, tu as fait tout ce que tu as pu.
    Je te souhaites de pouvoir parler de cela avec ton enfant afin d’accepter ce qui s’est passé et de pouvoir guérir doucement.
    Bref, je t’encourage de tout coeur a te battre et a porter plainte oui, c’est un début comme tu dis.
    Amicalement.
    Céline.

  8. Laitue sévère 21 janvier 2014 à 12 h 38 min #

    Ici, comme partout, les femmes ne sont que des bouts de viande utiles à la procréation, tant qu’on ne prendra pas notre destin en main en combattant le machisme partout, on ne sera que des bouts de viande !!!

    NB à toutes les filles : pour éviter l’épisiotomie il y a une méthode simple et efficace; dans les derniers mois de la grossesse, le vagin, imbibé d’hormones se transforme en pâte à modeler… c’est exprès… Il faut juste un peu pousser mère nature et assouplir encore cette matière de pâte à modeler avec des godemichets de plus en plus gros, larges surtout… à 10 cm de diamètre, vous êtes prêtes au passage du bébé !!!!!!!

    Voilà, c’est trashs, c’est cracra, c’est contraire à l’image de fille évanescente aux cacas papillons, mais ça marche, mais si vous comptez sur une médecine patriarcale dans un monde judéo-chrétien pour vous l’expliquez, chassez plutôt la licorne, vous avez plus de chance !!!!!

  9. Héloïse 22 janvier 2014 à 21 h 27 min #

    Votre témoignage est plein de courage, c’est révoltant d’être traitée ainsi dans un hôpital (j’ai aussi eu droit à cette épisiotomie imposée et en bonus à la révision utérine, les deux inutiles physiologiquuement mais un gain de temps pour eux, par facilité, flemme, sadisme ?) …
    J’ai déposé mon témoignage sur le blog (n°328), j’ai aussi réclamé mon dossier médical et dénoncé ces pratiques au chef de service qui m’a reçue deux ans plus tard avec de mièvres excuses … J’attends mon deuxième pour la fin du mois, oil m’a fallu 10 ans pour remettre ça !

  10. Luna 10 juin 2016 à 13 h 25 min #

    Bonjour, beaucoup de pensée pour vous, j’ai moi même subit un accouchement désastreux, qui a boulversé ma vie, il m’aura fallu beaucoup de temps, d’aide pour retomber enceinte, et vivre ma grossesse sereinement et vivre un 2e accouchement comme je le voulais en position physiologique !

  11. Imph 10 juin 2016 à 14 h 57 min #

    ça me rapelle un peu mon 1er accouchement mais qui etait bien moins pire
    En France, l’accouchement reste tres medicalisé contrairement aux pays dit en voie de developpement ou les femmes accouchent dans la position qu’elle souhaitent et qui est bien plus naturelle

    pour mon 2eme ça s’est beaucoup mieux passer

    Beaucoup de courage pour le perinée
    j’ai eu une dechirure totale (2012) et je dois faire mes exercices à vie

  12. Agnès 10 juin 2016 à 16 h 49 min #

    Quel courage. Malgré vos douleurs physiques et psychologiques, je vous admire piur votre confiance en vous. Je vous admire d’avoir si bien tenu tête à l’équipe médical en face de vous.davoir insisté et de vous être debatu dans ce cafarnaome. Quelle injustice ! Je ne suis en parcours de Pma donc pas encore enceinte et j’appréhende déjà l’accouchement justement à cause des violences obstétricales. J’ai lu bcp de témoignages semblables au votre et il est compliqué de porter plainte à cause des « protocoles » et d’avoir agis selon le principe bénéficie/risque du moment, a cause du dossier médicale. ..mais peut être pas impossible. Bon courage, bonne continuation. soyez bienveillante avec vous même, vous avez fait tout ce que vous avez pu. Vous n’êtes pas seule.

  13. Geraldine 10 juin 2016 à 18 h 54 min #

    ….
    Je suis sage-femme. J’ai quitté l’hôpital pour ne plus avoir à subir ça de la part des médecins et effectivement de beaucoup d’autres corps de métier qui gravitent autour de la naissance. Vous avez été extrêmement courageuse de vous opposer à cette équipe si fortement. Bravo vous pouvez etes fiere de vous

    Je vous encourage à porter plainte, cela vous permettra peut être d’apaiser vos souvenirs douloureux et de vous rétablir le cœur un peu moins lourd. Mais ça fera peut être réfléchir le medecin, les équipes, et si chaque femme ayant vécu un accouchement si difficile avaient votre courage, les choses pourraient changer… Peut être…
    En tout cas, je vous souhaite bon courage mais je suis certaine que vous en sortirez plus forte, je vous le souhaite en tout cas…

  14. PRUD'HOMME 10 juin 2016 à 18 h 56 min #

    C’est tellement triste ! Je pleure à la lecture de votre témoignage. Cela fait bientôt trois ans maintenant, j’espère que vous avez réussi à avancer et à vous sentir mieux.

  15. Petitfleur 10 juin 2016 à 19 h 49 min #

    Merci pour ce texte.
    J en ai pleuré….

    Il y a beaucoup de similitudes avec ce que j ai vécu.

    Lire ton texte, partager mon expérience, c est comme un bol d oxygène. Je sais que je ne suis pas seule. Mais si parfois, je préférerai être l exception et ne pas voir toute ses femmes qui comme moi, on été mutilé et violé par l équipe médicale.

    J aimerai te prendre dans ma bras.

    Dans 6 jours, mon fils aura 7 mois, et hier, j ai reussi à enfin, retrouver une foufoune digne de ce nom ! Et je vais réussir à avoir redenouveaux une sexualité épanoui

  16. Jackie 10 juin 2016 à 21 h 41 min #

    Bonjour,
    je viens de lire votre témoignage, je tenais à vous dire que vous êtes forte. Un jour on y arrivera. Pas seulement à mettre fin à l’épisiotomie mais faire en sorte que toute femme soit écoutée durant son accouchement et respectée, car la façon dont l’équipe de l’hôpital vous a traitée du début à la fin est hallucinante, la façon dont on vous a parlé également.
    Iels doivent comprendre, le corps médical, que ce sont NOS corps, nos utérus, que nous les connaissons mieux qu’elleux, ce sont nos nerfs, nos cycles menstruels que nous avons eu à gérer avant tout accouchement, qui nous prépare à connaître notre corps.
    Et nos bébés. Une naissance est un moment important, qui doit absolument se passer le mieux possible, car, comme vous l’avez malheureusement vécu, ça conditionne l’état dans lequel vous serez ensuite, et c’est du temps perdu où tout ce beau monde aurait pu faire en sorte que vous soyez à l’aise, heureuse avec votre enfant, que vous puissiez vous concentrer là-dessus (c’est quand même déjà beaucoup d’énergie demandée).
    Je n’ai jamais eu d’enfant à ce jour, j’ai 20 ans, j’ai eu des témoignages similaires de femmes autour de moi. J’ai presque peur.
    Nous sommes des êtres-humains, de sexe féminin, pas des « reproductrices sur pattes », notre vie émotionnelle et sexuelle compte aussi.

    Il faut également apprendre aux hommes, nos éventuels futurs compagnons, que la personne à écouter dans ce genre de moment, si la vie de notre enfant n’est effectivement pas mise en jeu, c’est nous. Nous sommes la clef. On ne le dit pas assez.

    Votre enfant va bien, au moins, iels n’ont pas affecté sa vie. Manquerait plus que ça. 😉

  17. Nathalie 10 juin 2016 à 21 h 43 min #

    Je suis vraiment choquée par ce témoignage, surtout s’agissant d’une maternité réputée moins médicalisée. Pour ma part j’ai accouché dans une maison de naissance rattachée à une telle maternité – il n’y en a pas 10 à Paris… – et même si je n’ai pas eu un travail aussi long, l’expulsion en elle-même a durée 1h45. N’étant entourée que de la sage femme et de mon mari, la naissance a pu néanmoins se faire naturellement. Malgré mon épuisement, le fait que j’aie pu marcher jusqu’à la dernière minute et me placer dans la seule position qui me paraissait compatible avec un accouchement, à savoir à genoux et prenant appui sur mon mari, je n’ai eu quasiment aucune déchirure, et le bébé allait très bien. J’avais conscience que si j’avais été prise en charge par une équipe hospitalière, quelle qu’elle soit, je n’aurais pu échapper aux forceps – et donc à l’épisiotomie – ou, pire, à la césarienne. Cela à cause de la règle des fameuses 30 minutes (ce n’est pas 20 d’ailleurs), standard qui n’est fondé sur rien d’autre a priori que sur la lassitude des personnes présentes à voir une femme qui pousse et crie sans que rien ne sorte… Néanmoins j’étais incapable d’envisager que l’on puisse être traité avec une telle violence, un tel déni de la dignité humaine. Je ne sais pas si porter plainte vous permettra de trouver un exutoire à votre colère et fera cesser vos ressassements car les procédures judiciaires peuvent elles-mêmes entrainer tant de frustration et d’humiliation, mais vous pouvez au moins militer pour cette cause désormais. En fait, vous le faites déjà. Et si votre entourage s’est jusqu’alors montré peu réceptif à votre traumatisme, au-delà de cet entourage vous devriez trouver beaucoup d’oreilles/lectrices attentives et de personnes reconnaissantes. J’aurais aimé que vous donniez le nom de la maternité dans laquelle vous avez accouché, car, enceinte de mon deuxième enfant, je pensais m’orienter vers une telle maternité à Paris. Non pas parce que j’ai été déçue de mon expérience en maison de naissance, mais que je me disais que ça devrait tout aussi bien se passer (et maintenant que je sais faire !) sans les dépassements d’honoraires. Bref, j’imagine que si vous ne donnez pas le nom c’est que vous ne souhaitiez pas le faire, mais en tout cas à lire votre témoignage je me demande si je ne devrais pas revenir sur ma décision. Bon courage en tout cas.

  18. coco 10 juin 2016 à 22 h 05 min #

    Vous avez toute ma compassion et tout mon soutien pour vs relever de ce traumatisme et de cet abus de pouvoir. et un jour, si vous en avez la force, pour porter plainte et obtenir justice!!
    j:espère que vous pourrez, un jour, poser un regard apaisé sur cette violence sans nom que vous avez subie avec votre compagnon, violence qui malheureusement porte certainement les mm marques que le viol.

    J’espère que vous pourrez en parler à votre enfant et trouver de la joie à ses côtés, de plus en plus.

    courage

  19. Patricia 10 juin 2016 à 22 h 55 min #

    Je m’étais préparée un peu comme toi, souhaitais un accouchement le plus physiologique possible… J’ai accouché en un peu plus de 5 heures, aucune alerte, aucun problème médical… Sauf qu’après une heure de forcing « pro » péridurale à me saper le moral j’ai fini par l’accepter, la péri… J’avais refusé l’épisiotomie, ayant lu probablement les même résultats d’études que toi… elle ne m’a pas prévenue. J’ai juste entendu le bruit métallique des ciseaux, et c’était trop tard. La petite jeune m’a recousue (faut bien apprendre…) et quand la sage femme est revenue elle a regardé et dit : »Vous avez voulu économiser le fil là ? … Non ben laissez comme ça maintenant que c’est fait, tant pis ». Le morceau de viande que j’étais visiblement devenue pour elle essayait de se concentrer sur son bébé pour ne pas pleurer. J’ai mis des mois à m’en remettre. Mon fils a 6ans et demi maintenant. Je pensais avoir digéré… mais mes larmes en lisant ton histoire me prouvent que ce n’est pas encore tout à fait ça.

  20. Clara 11 juin 2016 à 0 h 58 min #

    Bonjour, je suis profondément touchée par votre témoignage et suis admirative de votre courage à nous révéler cette expérience traumatisante et pourtant trop souvent passée sous silence…
    Vous parlez de porter plainte, ne porter pas plainte en pénal ou en civil : ça n’aboutira surement pas. Pour se faire entendre dans ce milieu, il faut porter sa plainte devant l’ordre des médecins.
    Courage, vous n’êtes pas seule.

  21. Ophélie 12 juin 2016 à 7 h 52 min #

    Pfiou votre témoignage m’a mis une claque parce qu’il est très émouvant et parce qu’il me rappelle ma première grossesse cette événement qui devrait être si merveilleux qui peut facilement tourner au cauchemar a cause du » nous savons mieux que vous » du corp médical alors que tout ce passe en Nous et que personne ne peut savoir mieux que notre corps. Je n’ai pas vécu d’episio mais un hellp syndrome mal diagnostiqué, on m’a traité de menteuse et traité de fille douillette en se débarrassant de mes plaintes à coup de spasfon alors que mon foie allait éclater, que ma vessie ne fonctionnait plus et que ma tension était a 19. Sans l’hystérie de ma voisine de chambre qui a fait un scandale tonitruant dans la maternité je ne serais plus là. Après 15 jours en soin intensif sans voir mon bébé on m’a laissé sortir sans explication sans même me dire de quoi j’avais souffert et surtout sans me dire que tout cela aurait pu être évité parce que j’avais tout les signes avant coureurs au moins deux mois avant. J’ai été perdu pendant des mois, épuisée et culpabilisant de n’avoir pas fait connaissance avec mon fils dans ses premiers jours. Il m’a fallu plus de 5 ans et des milliers de lectures sur le sujet pour oser refaire un bébé, et pour me blinder d’avance face au corps médical. Aujourd’hui j’attends le 3eme et je suis encore obligée de me battre pour être écoutée c’est comme ça, nous sommes vues par les soignants comme des ignorantes stressées pleines d’hormones alors je le prend a contre pied leur regard parce que je sais maintenant que j’aurais eu raison de me battre la première fois, je n’ai pas honte de faire un scandale.
    Bon courage pour la suite. Ayez confiance en vous surtout en la capacité de votre corps a surmonter tout ça et a être plus fort pour la suite.

  22. ALLAIN 12 juin 2016 à 14 h 25 min #

    Peut être cet acharnement à faire des épisio à tour de bras serait il motivé par le fait que c’est un acte chirurgical, et donc facturé comme tel…?

  23. lea 13 juin 2016 à 10 h 07 min #

    J’ai lu. Je me suis revue lors de mon premier accouchement à certains passages
    Je n’avais que 22 ans je ne voulais pas de péridurale. Mais après cinq jours de faux travaille, et douze heure de bon gros travaille , l’insistance du personnel , ça s’est finie par une péri ou l’on ma injecté du produit plus que ce que je souhaitais et une episio.
    Bref cet accouchement je ne l’ai pas aimé et je redoutais le second.
    Pour mon deuxième accouchement je suis arrivée a la maternité au tout dernier moment je suis montée, me suis déshabillée ai pousse deux fois et mon bébé était là. Mon episio a déchiré.

    Personnellement, je n’ai pas souffert de mes points. J’avais bien plus mal aux hémorroïdes qu’à ma plaie.
    Ça ne me gêne pas dans ma vie intime et mes habitudes hygiéniques.

    Tout ça pour dire, que premièrement le ressenti est personnel, je ne suis pas de nature angoissée ça soir jouer aussi.
    Deuxièmement, il ya effectivement de l’abus de pouvoir du personnel soignant surtout quand on est primipare. Hey bien Oui quand ils sont débordés si ils peuvent arranger ça dans leur sens au détriment des mamans il le font (bien sure ça dépend des équipes et des endroits: Ne généralisons pas)

    Mais je pense aussi, qu’il ya un moment ou en tant que maman en devenir on est plus en pleine possession de ses moyens, trop pris par l émotif, la douleur, l’angoisse, ou l’action en cours. (c’est pareil ne généralisons pas chaque cas est particulier) et que par moment le personnel soignant est mieux qualifié que nous maman, de par son savoir, pour agir.

    Toujours est il que je voudrais qu’ily ai plus de place pour les volontés des parents. Et d’ailleurs je partage moi même mon expérience avec mes amies futur maman que ce soit sur l’accouchement ou l’allaitement pour éviter ce genre d’abus.

    Je compatis totalement á cette histoire
    Et ce qui me choque le plus c’est que personne n’ai pris en compte les sentiments et les réactions de cette maman.

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