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Le récit d’un accouchement à domicile, décembre 2012

11 Fév

J’étais à 6 mois de grossesse lorsque j’ai décidé de te donner la vie à la maison. Il n’a pas été facile de convaincre ton papa qui avait plein de craintes. Moi aussi j’en avais avant. Mais a partir du moment où j’avais pris ma décision, elles s’étaient toutes envolées.

J’ai donc fait des recherches. Les avantages, les inconvénients et toutes les données recueillies faisaient pencher la balance en ma faveur. Mais ton papa n’était pas encore tout à fait rassuré. Jusqu’au jour où j’ai trouvé un mémoire d’étudiante sage femme, sur l’accouchement a domicile. Je l’ai lu (entièrement) à voix haute pour en faire profiter ton papa. A la fin nous étions autan convaincu l’un que l’autre : Tu naitras a la maison et ce sera le mieux pour nous deux.

Il fallait faire vite, la grossesse avançait et nous n’avions pas de sage femme qui pratiquait l’aad. Après m’être renseignée un peu partout, j’ai trouvé le numéro de C et E, un rendez vous a été prévu très vite avec chacune d’entre elles, puis il a été décidé que, le jour J, j’appelle en priorité E.

Ce jour, c’était le 16 Décembre, cela faisait déjà un moment que je rongeais mon frein, je n’ai jamais été aussi sûre de moi. Cet accouchement se passerait bien.

La veille, avec ton papa, nous sommes allé faire un tour pour visiter un peu la région et manger un américain au grand M (ton papa n’était pas trop d’accord pour ce dernier point, je l’ai convaincu en disant que c’était ce que tu voulais manger en « dernier repas »). 4h de voiture, des embouteillages, des nids de poules… En rentrant j’étais épuisée mais agitée et excitée. La perte du bouchon muqueux en était peut être la raison. Nous allons nous coucher vers 23h.

A 4h30 je suis faite réveillée par une sensation de gêne. Je me lève, vais boire un coup et retourne me coucher. Plus moyen de fermer l’œil, je tourne et vire dans le lit jusqu’à en réveiller ton papa.

 

-Qu’est ce qu’il t’arrive ?

-Je ne sais pas je me sens nerveuse

-C’est pour aujourd’hui ?

-Je ne sais pas…

– Réveille-moi si ça évolue.

 

Je me lève donc pour ne pas le gêner plus. Je m’installe sur mon ballon et allume le pc sur la page de calcul des contractions (histoire de voir si ces « gênes » correspondraient. Effectivement c’est relativement régulier (durée entre 30 et 40 secondes avec des repos entre 5 et 6 minutes).

7H, je vais tenir informé ton papa sur l’évolution, les contractions sont franches mais absolument pas douloureuses. Dans son demi sommeil il me demande si j’ai appelé E, je lui dis que non, « ben laisse la dormir encore ! » avant de replonger dans le sommeil.

La première excitation passée, je me suis retrouvée seule face à cet évènement, le doute s’est installé.

Je n’ai jamais remis en cause l’accouchement à domicile, mais plutôt ma capacité à gérer ça comme une chef. Et puis j’avais peur que tout s’accélère d’un coup et de devoir accoucher seule (la durée moyenne des accouchements dans ma famille est d’une heure, sans douleur et sans signes apparent avec la phase d’expulsion et E. se trouvait a 1h30 de chez moi). Je tourne en rond chez moi, je joue sur le pc pour oublier ma nervosité et mon stress…

10h30, papa se lève enfin ! Il va pouvoir me rassurer de sa présence. Il me fait couler un bain et me dit d’appeler E.

Elle me demande si c’est régulier, douloureux… Elle ne s’inquiète pas et veut refaire le point dans une heure.

Je me glisse dans l’eau, le ventre commence à tirer sans que ça fasse mal. Je me concentre sur nous, je n’ai plus peur, ton papa n’est pas loin.

12h E rappelle, les contractions sont devenues anarchique mais je les sens bien à présent. Elles ne font toujours pas mal. Elle m’informe qu’elle prend son repas tranquillement et qu’elle vient ensuite. A vu de nez elle prévoit l’accouchement pour le lendemain matin.

Je commence à faire le repas, je marche et je m’arrête en sentant la contraction arriver, je gère bien, pas plus mal que de légères courbatures.

A 15h E, arrive et m’examine « tu es a 1 le pré travail commence, ton loulou sera la dans la nuit ». Elle monte se reposer dans une chambre d’ami.

Vers 16h mon ventre commence a me « chatouiller » grandement, je souffle et commence à m’accrocher au cou de ton papa.

17h, nouvelle vérification « tu es a 3, le travail commence»

Vers 17h30, a la fin d’une contraction j’ai entendu un « crouck » qui m’a arraché un cri de surprise.

E m’a demandé si j’avais percé la poche des eaux

« Je sais pas… » en me levant « Oui ! Oui !… »

« C’est maintenant que tu vas commencer à t’amuser… » A ce moment j’ai trouvé que E avait beaucoup d’humour…

Nous sommes passés dans la chambre ou nous voulions que tu naisses. Ton papa et E ont installé les alèses sur le sol et sur le lit.

A partir de ce moment je n’ai plus de notion de temps. Les contractions sont devenues très douloureuses.

Moi je cherchais une position qui soulage ma douleur. E m’a demandé de m’allonger sur le dos pendant 3 contraction pour écouter ton cœur, voir si tu ne souffrais pas. Ce fut la position la plus douloureuse, j’en pleurais presque, mais toi tu allais bien. Je me suis remise debout, ton papa s’en assis sur le lit. La contraction suivante m’a fait tomber a genoux, j’ai étendu mon buste sur les cuisses de ton papa enserrant sa taille, mes genoux sur le sol. J’étais « bien » ; mon corps poussait tout seul, je l’ai dit a E, qui a vérifié la dilatation du col.

« Ne pousse pas trop, il reste un bourrelet de col »

« Je ne peux pas m’en empêcher !! »

« Alors ne pousse pas plus que ce que ton corps te demande »

T’inquietes pas E, je n’ai absolument pas l’envie de pousser plus… Mes muscles me malmènent déjà assez !

La douleur était inimaginable et lorsque j’ai sentie la « brulure » je me suis sentie soulagée. On nous dit aux cours de prépa, que lorsque la brulure se fait sentir, c’est que la tête sort. J’ai donc posé ma main sur mon périnée pour sentir le bombé de ta tête mais là… Il était tout plat et souple.

Je me suis sentie désespérée, je me sentais mourir.

Entre deux contractions je me suis entendu demander à E si ce n’était pas trop tard pour la piqûre… Elle a rit.

Je te sentais te démener pour sortir toi aussi.

A la fin de la contraction d’après je l’ai entendu me dire qu’elle voyait tes cheveux, que ça n’allait plus durer très longtemps.

Contraction, ta tête est sortie.

« Ce serait bien que tu te retourne pour l’attraper »

J’avais les jambes en compotes, mes genoux me faisaient mal et je n’avais pas la force de bouger, je lui ai dit. « C’est pas grave, tu te débrouille très bien »

La contraction suivante est arrivée très vite. Je la sentais partir mais tu n’étais pas encore sorti, alors j’ai rassemblé mes dernières force pour pousser de plus belle avant la fin de la contraction. Je ne t’ai pas senti sortir, j’ai eu un moment de flottement, je n’avais plus mal je ne savais plus où j’étais ni ce que je faisais. J’avais juste très chaud. J’entendais vaguement la voix de E et de ton papa, qui était resté silencieux tout le long de l’accouchement. Puis un petit son m’a ramené à la réalité.

Je me suis redressée et ai regardé au sol. Tu étais là, sur une alèse a même le sol, tu pleurais et E t’essuyait grossièrement. Je me suis littéralement jetée sur toi afin de te serrer contre mon cœur. Tu t’es tut, tu m’as regardée, plus rien n’existait.

Ce soir là je pense que la jeune fille est morte et que la maman est née. Il était 20h55

Ton papa n’a pas trop osé te prendre dans ses bras (de toute façon moi je ne voulais pas te lâcher).

J’ai demandé à E quand le placenta sortirait, elle m’a dit d’attendre, qu’il y aurait une contraction et qu’il sortirait tout seul. Nous avons attendu, rien ne venait je lui ai proposé de pousser comme ça, dans le vide, il est sortit de suite. Ton papa est sortit pour prévenir le monde qu’une merveille venait de naître.

#336 Un accouchement idyllique, la suite un peu moins

2 Fév

J’ai accouchée le 16 décembre 2012 à 20h55 à la maison, dans le calme et la douceur avec F., mon compagnon et E. ma super sage femme.
Il y a eu juste ce moment où mon loulou a fait une détresse respiratoire, très vite réglée par E. Cependant avec l’inquiétude je me suis mise a saigner. Pas beaucoup, mais assez pour que E. me demande d’aller a l’hôpital. C’était le deal. Au moindre couac, direction la maternité!
Nous y sommes arrivé vers 23h. E. est venue avec nous.
Dès notre arrivée, une auxiliaire de puériculture m’a enlevé mon bébé pour l’emmener « faire les examens d’usages ». Le papa a pu aller avec lui (sans le toucher bien sur, c’est fragile ces choses là monsieur, laissez faire les professionnels!).
Pendant ce temps la sage femme de service a voulu vérifier la suture que E. avait fait sur ma déchirure. J’avais un œdème et lorsqu’elle a touché pour essayé de voir les points ça m’a fait extrêmement mal. Elle m’a également appuyé fort sur le bas ventre pour évacuer le sang et fais une petite toilette a l’eau froide. Malgré tout elle a été gentille et m’expliquait ce qui se passait.
Une fois la première partie de la torture finie (elle m’a appuyé fort sur le ventre jusqu’à environ 4h du matin, j’ai eu un hématome sur le point d’appuis le lendemain) le pédiatre (je l’ai lu sur son badge et son air condescendant) a fait son  apparition pour me « rassurer » suivit par F.
« Madame, ce que vous avez fait est très grave! Votre fils a failli mourir! Bon il va bien maintenant que nous l’avons aspiré et mit sous oxygène! Vous pourrez le voir dans la matinée! »
A moitié sous le choc de cette tirade j’ai osé demander a le voir plus tôt ne serait-ce que pour lui donner la tétée, il n’avait pas voulu prendre le sein a la naissance et du coup n’avait pas encore mangé.
« Ha! Mais ne vous inquiétez pas nous lui avons déjà donné un biberon! » avant de faire volte face et de nous planter là.
J’ai regardé avec de grands yeux, mon compagnon, E. puis la sage femme.
« J’espère que vous n’avez pas fait ça… C’est une entorse a la charte du patient! Je ne suis pas dans les vapes, ni le papa! Vus DEVIEZ nous dire ce que vous alliez faire!! »
J’étais fatiguée, a bout de nerfs et de patience. E. me caressait doucement les cheveux en me demandant de rester calme. La sage femme avait l’air de ne pas comprendre les paroles du pédiatre.
« Ils ne lui ont rien donné, en tout cas pas encore, Monsieur est resté avec le petit jusqu’à ce qu’il entre en néo natalogie, le temps qu’ils le scopent et qu’il l’installent… Venez Monsieur je vais vous emmener le voir comme ça vous pourrez leur dire de ne pas lui donner de biberon. »
Je l’ai chaudement remerciée, ils sont revenus quelques minutes après, le petit avait pris une pipette de lait… Bon, adieux ma première tétée, mais c’est toujours mieux que le biberon.
E. est partie après une dernière pression utérine. Elle aura été avec nous pendant plus de 12h.
Ne tenant pas sur mes jambes, la sage femme m’a installée sur un fauteuil, et nous a emmené F et moi voir notre bébé. Elle est repartit après s’être assurée que quelqu’un pourra nous conduire a notre chambre.
Nous avons été reçu comme il se doit…
-« Qu’est ce que vous faites encore là? Voir le petit? Il est fatigué et a besoin de se reposer! Et vous aussi madame allez dans votre chambre! »
En regardant derrière elle j’ai pu apercevoir mon tout petit, allongé sur le dos, des fils partout, un tuyaux a oxygène dans le nez entrain de hurler. J’ai senti monter une fois de plus mon envie de meurtre.
-« Il a surtout besoin de sa maman et moi j’ai besoin de lui! De plus j’aimerais lui donner le sein, il n’a pas tété encore et je ne voudrais pas manquer ma montée de lait! »
-« Mais madame, c’est pas en lui donnant le sein que le lait va monter! C’est en vous reposant! »
-« Je ne vous ai pas demandé votre avis… Je ne partirais pas sans avoir vu mon fils… »
Il y avait une autre maman dans la pièce avec un minuscule bébé dans les bras qui observait la scène. Je pense que si elle n’avait pas été là, la puéricultrice m’aurait tout simplement fermé la porte au nez.
J’ai pu enfin serrer mon fils dans mes bras, chose que je n’avais pas fait depuis presque 6h. Je suis restée avec lui de courtes minutes puis F. exténué, m’a demander d’aller en chambre qu’on puisse se reposer quelques heures.
Arrivé en chambre j’ai demandé un tire lait. L’aide soignante m’en a apporté un et m’a expliqué comment faire.
J’ai dormi un peu et après le changement d’équipe je suis retournée voir mon petit.
La puer de jour n’était pas beaucoup plus engageante que celle de la nuit, m’enfin elle a débranché les fils de la machine et m’a mis mon fils dans les bras. Il n’avait plus d’oxygène, par contre ils lui avait laissé d’affreux sparadrap sur les joues.
Je suis restée avec lui jusqu’à midi, puis la sage femme de jour est venue me chercher car elle voulait voir la suture.
Elle n’a pas été douce du tout. Quand j’ai osé gémir alors qu’elle écartelait mon intimité tout oedémaciée elle m’a dit que d’arrêter mes enfantillages et que quand on fait n’importe quoi il fallait en assumer les conséquences. Du coup je lui ai demandé si sa mauvaise humeur faisait partie des conséquences a assumer. J’ai eu encore plus mal ensuite. Elle m’a enlevé ma perfusion et m’a entouré le bras de sparadrap avec un petit sourire satisfait.
j’ai donné mon plateau repas a F. (puisque personne nous avait proposé de plateau accompagnant) et suis retournée en néo nat.
En fin de journée, voyant les fils constamment débranché j’ai demandé a la puer si je pourrais avoir mon petit en chambre.
-« Non! il faut surveiller son taux d’oxygène dans le sang! »
-« Mais il a passé sa journée débranché! »
-« oui mais vous le surveillez »
-« Ben je peux le surveiller dans ma chambre… »
-« Non c’est non. »
Au final j’ai récupéré mon fils que le lendemain soir. Je n’ai pas connu les équipes suivantes, je m’arrangeait pour ne pas être dans ma chambre lorsqu’elles passaient et elle ne sont pas venu me chercher.
J’ai vu un second pédiatre le matin de mon hypothétique sortie.
-« Il va très bien cet enfant, vous pouvez sortir… Attendez c’est vous qui avez accouché a domicile? »
-« ……..oui……. »
– » Le taux de sucre est trop bas, surveillance glycémique de 24h! »
Je devait réveiller mon loup toutes les 3h pour le faire piquer et ainsi « surveiller sa glycémie », pendant la nuit, la sage femme de garde m’a dit que c’était un prétexte pour me garder 24h de plus car dans cet hôpital « on ne sort pas avant 3 jours ».
Au matin, lorsque le pédiatre est entré dans ma chambre je lui ai dit cash
-« Soit vous me laissez sortir, soit vous me donnez une décharge, dans tout les cas a midi je ne suis plus dans vos murs »
-« Si vous aimez jouer avec la vie de votre enfant, ce n’est pas mon problème, donnez le moi je dois au moins faire la visite du 3eme jour »
Je lui ai laissé faire sa visite puis j’ai plié bagage et a 11h je n’étais plus dans leurs murs.
Je suis enceinte de mon deuxième enfant et j’ai bien l’intention de recommencer l’expérience de l’accouchement a domicile. J’ai changé de maternité de secours et le peu que je les ai vu les sages femmes ont l’air plus engageantes. Nous verrons bien en avril!

Une naissance à domicile, septembre 2010

7 Jan

Septembre 2010

Je me réveille un papillon sur le coeur, semi sourire aux lèvres … Je pressens quelque chose … Je me lève et quelques instants plus tard, petit splash! tu t’annonces enfin! Je perds les eaux! Mon coeur se gonfle de joie, çà y est, c’est parti! Je fond de bonheur, mais je me dis, « ne te précipites pas, les contractons n’ont pas commencées, on va peut être attendre longtemps avant que la naissance arrive » J’entends Yoann qui est occupé au téléphone dans le salon, j’ai hâte de lui dire!

Je sors de la salle de bain et il suffit à mon homme de voir ma mine enjouée pour comprendre qu’il y a du nouveau. Nous nous serrons dans les bras l’un de l’autre, tout émus de l’évènement qui nous attend … Mais biiiip, on sonne à l’interphone, des amis arrivent pour boire un café, sauf que je ne me sens pas d’humeur sociable, alors hop je file au lit, et savoure toujours avec la grosse banane au visage ces derniers moments seule à seule. Dans ma tête défile cette belle grossesse que nous avons vécue à fond du début à la fin.

9 mois d’une grossesse merveilleuse, je me sens bien, épanouie, belle, et surtout heureuse, remplie de bonheur, et d’amour (au sens propre!)

Depuis quelques jours cependant, je deviens impatiente, je n’arrive pas à penser à autre chose qu’à l’accouchement et passe chaque minute à guetter les signes de ton arrivée. J’ai tellement hâte! De te connaitre, mais aussi de vivre cette naissance à laquelle je pense depuis des mois. Je me sens fin prête, mon homme aussi. Nous avons passé des heures à discuter de cette naissance, nous imaginant des scénarios possibles, confiants, et fiers des notre choix.

Ce projet de naissance à domicile, nous l’avons mené depuis bien longtemps, bien avant le début de la grossesse, influencés et encouragés par des proches qui ont déjà vécu la grande expérience d’une naissance naturelle, physiologique comme disent les bouquins. Pour moi, c’est une évidence, hors de question de me retrouvée allongée, branchée et les pieds dans les étriers. Je suis d’une nature indépendante, et je me sens capable d’affronter la douleur qui accompagnera la venue de mon bébé. Je pense à cette douleur comme à un rite initiatique, quelque chose qui m’aidera à m’ouvrir, à faire naître cette enfant.

Il y a quelques années, j’avais rencontré une sage-femme qui accompagne des naissances à domicile. A l’époque, je m’étais déjà dit « C’est elle, c’est elle qui sera là pour mes accouchements! » Et effectivement, dès le 2ème mois de grossesse, nous allons la rencontrer pendant une longue entrevue et elle nous confirme qu’elle est d’accord pour nous suivre. Dès ce premier rendez-vous, mon homme et moi ressentons cette ambiance ultra-zen dégagée par N.

Chaque mois, nous passons 1h30 tous les 3 à discuter de pleins de choses, de nos questionnements de futurs parents, et tout simplement de la vie! De beaux silences ponctuent régulièrement nos discussions, c’est toi, mon bébé qui t’immisce dans la conversation! Parfois, N. apprend à mon homme des massages de shia-tsu pour me soulager des petits maux de grossesse, quel bonheur!

Séance après séance, notre relation se construit, N. m’étonne de cette attitude ouverte et disponible, jamais elle ne nous imposera quoique ce soit. D’ailleurs dès le début du suivi, elle me dit que j’ai le droit de changer d’avis, que jusqu’à la dernière minute, je peux décider de partir à la clinique. Même si je n’en ai pas pas l’intention, cela me fait du bien de me sentir « autorisée ». Je ne veux pas que cet accouchement devienne un challenge, je souhaite seulement les meilleures conditions à la venue de ma fille.

Au final, nous parlerons assez peu du futur accouchement en lui même. Moi qui pensais qu’il me fallait « apprendre » à respirer, ou à me mettre dans certaines positions.. Et bien non! Avec N., je me sens encouragée à suivre mon instinct, à me faire confiance.

Pourtant une fois chez moi, chaque soir pendant le dernier trimestre de la grossesse, je lisais. J’en avais besoin, besoin de lire des témoignages d’abord. Et j’ai ensuite dévoré le livre d’Isabelle Barbant « Une naissance heureuse ». J’étais infiniment curieuse de savoir ce que j’allais vivre, ressentir, à tel point que je suis devenue quasi insomniaque, chaque nuit, je pensais avec envie à cette naissance..

Et nous voici au matin du 23 septembre, à 2 jours du terme prévu. Vers 10 heures, je me lève et vais rejoindre mon homme qui cherche à régler certains impératifs professionnels pour nous être disponible dans les jours qui vont venir. Et là, une fois debout, une première contraction arrive. Je la reconnais tout de suite, c’est exactement la même douleur que pendant mes règles. Je saute de joie, enfin une contraction douloureuse!! En effet, ces derniers jours, à chaque contraction je me demandais si l’accouchement démarrait, mais là c’est sûr, c’est différent! Je me sens rassurée car N. nous avait dit qu’après une perte des eaux, les contractions ne démarrent pas toujours naturellement.

Yoann part pour une petite heure, je me retrouve seule sans homme ni enfant pour la dernière fois! J’appelle N. en prenant mon petit déjeuner et lui explique où j’en suis. Elle me propose qu’on se rappelle tout au long de la journée, qu’elle pourra venir soit dans l’après-midi, soit en soirée après ses rendez-vous. Je lui dis : « Fais ta journée tranquillement, on se voit ce soir, je te rappelle! »

Je décide alors d’aller me promener dans le quartier. Je me souviendrai toute ma vie du chemin que j’ai parcouru ce matin-là. Les contractions se sont nettement rapprochées, mais de manière assez anarchiques. Parfois j’en avais 2 en 3 minutes, parfois aucune pendant 10 minutes. A chaque contraction, je me suis mise à expirer très doucement (pas besoin d’apprendre, çà vient tout seul!), et puis je prenais appui sur ce qui me tombait sous la main, un mur d’immeuble, une voiture! Entre 2 contractions, j’appelle quelques personnes de ma famille pour les prévenir. Ma mère est étonnée de m’entendre lui dire « ah en voilà une, elle fait mal, mais ouha, chouette, elle arrive ».

De retour à la maison, je décide d’aller m’allonger pour prendre des forces. Forte des enseignements du livre d’Isabelle Barbant, je veille à me positionner correctement pour ne pas bloquer le travail. Je me mets donc sur le coté, jambe du dessus très haute. Je m’assoupis entre 2 contractions qui sont toujours aussi irrégulières, irrégulières mais tout de même fréquentes.

Mon homme arrive à la maison, et comprend que c’est vraiment parti! Nous déjeunons tous les deux, sans nous rendre compte que quelques heures plus tard, notre fille sera là. Pendant tout l’après-midi, les contractions continuent à ce rythme irrégulier, ce qui nous fait croire que l’accouchement n’est pas pour tout-de-suite. Je ne sais pas pourquoi, mais tant que les contractions ne sont pas « régulièrement espacées », je me dis que je suis en « pré-travail » et que à sa venue prévue pour 19h, N. m’annoncera que je ne suis dilatée qu’à 2 cm. Je me préparais à l’idée d’un accouchement long. Mais avec du recul, je me dis aussi que si nous n’avons pas appelé N. plus tôt, c’est aussi que nous avions envie de vivre cette phase de la naissance à 2. C’est si beaux de vivre ces moments avec son amoureux …

Je me souviens qu’à un moment, me voyant tourner comme une lionne en cage, Yoann me propose de refaire un tour du quartier. Nous descendons l’immeuble, faisons 100 mètres, et je me plie en 2, morte de rire, je ne peux pas avancer car je continue de perdre les eaux, et que des flots coulent!! Nous sommes en plein fou rire, là, dans la rue, sans savoir que l’accouchement est déjà bien avancé.

Je continue donc de « prendre les contractions une par une », en me concentrant sur mon col pour l’ouvrir « en pensée ». Je marche dans l’appartement, je regarde de séries télé sur le ballon d’accouchement, tout cela en étant toujours persuadée que le travail n’avance pas. Après un dernier tour dehors, je décide de prendre un bain.

Une fois dans l’eau, je me concentre sur mon bébé, lui parle doucement, et là je me dis « allez tu vas pas y passer 3 jours, n’aies pas peur, accouche! » Je sors du bain et annonce à mon homme qui dessine tranquillou dans le salon, « C’est parti, je prends un goûter et après j’accouche! » Je dis cela en riant pourtant c’est bien ce qui va se passer!

Après ce fameux goûter, vers 17h, je vais m’installer dans la chambre du bébé, là où nous avons prévu d’accoucher. Mais je ne tiens plus en place, je vais aux toilettes, reviens dans le salon, m’appuyant et poussant les murs à chaque contraction, ça commence à faire vraiment mal, là!

De retour dans la chambre, je me mets sur le coté, mais la douleur devient insupportable. Yoann me masse vigoureusement le bas du dos, c’est là que se situe la douleur. Cela me fait un bien fou, j’ai d’ailleurs pris l’habitude de dire que Yoann et ses massages, c’était ma péridurale à moi! Les contractions s’accélèrent, la tempête commence!

Je me positionne à genoux, la tête sur une pile d’oreillers. Dans ma tête je me dis « Au secours, si çà, c’est le début de la dilatation, je vais péter un plomb! ». Sauf que peu de temps après, à un moment, je sens la tornade des contractions s’arrêter nette. Mon corps « s’arc-boute » en arrière, je me retrouve à quatre pattes, et je crie à Yoann « çà pooousse!!! » Il est 19H, et ce n’est qu’à ce moment-là que nous comprenons que nous sommes VRAIMENT en train d’accoucher et que nous sommes seuls, la sage-femme vivant à plus d’une demi-heure de chez nous. Yoann parvient à ne pas paniquer, et appelle N. qui lui explique calmement comment agir si le bébé arrive avant elle!

Yoann a alors le tact de ne pas me dire que la sage-femme était encore chez elle, et me fait croire qu’elle est sur la route … J’ai hâte qu’elle arrive car pour moi, il est hors de question d’accoucher tous les 2.

La douleur est partie, je suis maintenant dans l’énergie de la poussée, mais qui est complètement involontaire. Je ne pousse pas, c’est mon corps qui pousse, je bouge sans m’en rendre compte, mon corps agit sans ma tête! Quelle force! et quelle fatigue! Ces poussées m’exténuent, je pense d’ailleurs que je m’endormais entre 2.

Même si mon corps pousse très fort, ma tête le retient quand même un peu car j’ai besoin de ma sage-femme pour aller au bout de cette énergie. A un moment je dis quelque chose que Yoann ne comprend pas. Il me demande « Qu’est ce que tu veux? », et à ce moment on entend l’interphone sonner. Je réponds : « C’est çaaa que je veux!! » Yoann sort alors de la pièce pour ouvrir à N. et là je sens les poussées décupler d’intensité …

Il va encore se passer une deuxième heure de poussées régulières et très fortes! Ma fille avance centimètre par centimètre, doucement mais surement!! N. écoute son coeur et nous confirme que tout se passe bien pour elle. Elle me demande si je veux qu’elle m’ausculte, j’accepte bien sûr car j’ai encore besoin qu’elle m’assure que je suis complètement dilatée, alors que tout prouve que c’est bien le cas! effectivement elle me dit : « Oui, oui, elle est juste là, ta petite puce. »

Nous nous concentrons tous les 3, je sens les mains de N. qui me masse les jambes car j’ai des crampes, Yoann me passe régulièrement des linges mouillés sur le visage et la nuque car j’ai très chaud. Je ressemble à une lionne, à quatre pattes, les cheveux trempés, Yoann me dira après à quel point il m’a trouvé belle.

Mon bébé approche, au bout d’un moment, je sens qu’on atteint la phase finale. Mon sexe me brule énormément, j’ai très mal, je suis très impressionnée par cette sensation, un peu choquée de ce qui m’arrive. Mais il faut continuer! Alors je m’accroche, il faut en finir! Je sens sa tête arriver, je la touche de mes mains, sensation douce, chaude, humide et molle. Mais … nooooon! sa tête re-rentre, au secours!! Alors, là, non, je rassemble mes dernières forces, et je la pousse très fort, je la veux dehors maintenant!

Elle finit par glisser d’un coup, je m’écroule en avant sur le lit, j’avoue que là, j’ai quelques minutes de flou, de fatigue extrême qui m’ont fait décrocher des évènements!

Ah si, un des premiers souvenirs de sa vie, c’est cet instant inoubliable où N. après l’avoir réceptionnée la pose sur le lit, et deux mains se posent sur elle, la mienne et celle de Yoann. Nos mains touchent son ventre chaud, glissant, je vois Yoann incroyablement ému. Cet instant-là, c’est peut-être le moment le plus fort de ma vie. Je me souviens très précisément de la sensation de cette nouvelle peau, la main de mon homme partageant la même expérience tactile. Il pleure, ébahi.

Mon bébé pleure, je ne sais plus lequel de nous deux la prend dans ses bras. On a tous les deux le réflexe de se déshabiller, besoin d’être peau nue comme elle. Elle pleure encore, c’est qu’elle en fait du chemin pour en arriver là!

Quelques câlins plus tard, je m’allonge sur le coté et pose ma fille contre moi pour sa première tétée. La lionne est toujours là, c’est comme si j’avais déjà allaité des dizaines d’enfants, c’est naturel et facile pour moi, comme si ce n’étais pas un début, alors que c’est mon premier enfant. Pour elle, c’est moins évident, elle tourne autour du pot une dizaine de minutes, renifle tout autour du sein, lèche, cherche, et pour finir, s’y accroche et se met à téter parfaitement bien. Je dis : « Elle ne sera pas difficile à nourrir, celle-là!! », l’avenir prouvera que j’avais raison, elle est restée très gourmande!

Pendant cette première tétée, le placenta sort alors que je pousse sans savoir si je pousse assez, mais si, il est sorti, ouf, tout est fini et tout s’est bien passé! Pour cet accouchement à domicile, on avait tout préparé, prévu (matériel médical, médicament en cas d’hémorragie, bouteille d’oxygène, …) mais je savais d’instinct qu’on n’aurait pas besoin de tout ça. J’avais juste une appréhension pour le placenta, peur qu’il ne sorte pas, ou pas d’un coup, alors là, c’est le soulagement final, on a réussi, on a été au bout de ce projet de vie incroyable, un moment de partage entre mon homme et moi, entre mon corps et moi, une rencontre parfaite avec notre fille.

Je dis souvent que le gros avantage d’un accouchement à domicile, c’est après! Quel bonheur! On mange ce que l’on aime, on dort quand on en a besoin.

Notre enfant est née à 21h, et à minuit, on se couchait tous les 3 dans le lit où elle est née. Bon, on ne peut pas dire qu’on ait vraiment dormi!! mais on était ensemble, heureux, sur un nuage!

Lucie, Yoann, et Coline, Rennes, France, 2010

Claire – Naissance respectée de Kenza – Belgique, 2012‏

2 Mar

Kenza arrive dans nos vies dans un contexte tout à fait différent des autres.
Nous avions décidé de nous arrêter à 4 enfants. J’avais repris une formation, devais chercher du travail… Mon mari avait eu un accident, perdu son travail…C’est un climat d' »insécurité envers l’avenir » qui reignait à la maison. Je ne veux pas rentrer dans les détails, mais juste expliquer un peu pourquoi je partais moi confiante que les autres fois …
Un Bébé surprise… J’avais eu droit à de l’hyperhemesis jusqu’à 4 mois (l’enfer de vomir au moindre mouvement, de moi ou des autres, à la moindre odeur, à la moindre pensée même…). S’ensuivent des mois de grossesse normale, si ce n’est qu’à la fin, mon foie a du mal avec les hormones de la grossesse… Ma gyneco me prévient qu’il y aura un risque de devoir me faire accoucher avant terme si ca empire. Je dois faire un prise  de sang toute les 2 semaines… Entre temps je me renseigne… Qu’est-ce qui aide, purifie le foie naturellement? Les artichaux…  Ca tombe bien, justement j’en avais envie depuis quelque temps… Je m’adonne donc à une orgie d’artichaux… Un mois plus tard la prise de sang stupéfie ma gyneco… « Mais qu’est-ce que vous avez fait? Normalement ca ne disparaît pas, ca empire avec le temps…- Heu, les artichaux… – Ah, oui, mais ca ne suffit pas toujours… ».
Finalement la situation redevient normale et peu avant l’accouchement, j’ai son accord pour accoucher à la maison. OUf… J’avais pas envie d’accoucher à l’hôpital… Mais en même temps j’aurais bien pris un petit 3 jours de congé, avec l’ambiance à la maison et mon mari sous médocs… Je me demandais si j’allais savoir le réveiller la nuit N… Comment j’allais faire avec 4 enfants à la maison?

Ma petite chérie joue, elle aussi, les prolongations… Prévue pour le 21 mars… Rien n’y fait, comme d’habitude, ni l’huile de ricin, ni le nettoyage des vitres, le jardinage, le « jogging »… J’en ai marre des « Alors, pas encore accouché? »… Ca se voit non?  Elle attend « son » moment et me surprendra encore une fois…
En pleine nuit, je suis réveillée, je suis toute mouillée… Rachid me demande si j’ai fait pipi (oui quand on réveille un homme la nuit, toutes les connections ne sont pas immédiates…) C’est le liquide amniotique… Changement de programme… D’habitude j’ai d’abord les contractions, puis la poche se rompt… Je dois faire quoi?? Ah oui, la couleur, je ne sais pas: c’est absorbé par le drap, il y a des petits trucs blancs… J’appelle H., je ne veux pas la déranger car je sais qu’elle a eu plusieurs nuits d’accouchements de suite, mais je ne suis pas rassurée… Elle me dit pas de problème, change le drap, recouche-toi et attends les contractions…
Je me recouche et sens un petite pression dans le bas qui s’amplifie et les contractions s’installent petit à petit.  Il est 4h du mat, je mets en moyenne 4 heures pour accoucher. C’est parfait à 8 heures elle sera là, quand les grands se réveilleront…
Je me laisse polluer par cette question de « accoucher avant que les autres ne se lèvent » et ca n’avance pas. J’ai besoin de H. pour me rassurer. Elle vient, 3 cm, je crois. Je marche et m’accroupi pour me stimuler. J’ai des conractions mais je n’arrive pas à me détendre…Et l’heure tourne… En fait je ne veux pas accoucher… J’ai déjà donné… « Je veux une péridurale »… H. et Rachid se regardent (l’air de dire elle déraille…) . Mais ils ont plus confiance en moi que moi-même… Il est presque 8 heures, les enfants se réveillent. Pendant que Rachid va les voir, H. m’encourage et me dit que je sais si bien accoucher qu’elle raconte souvent la naissance d’Assiya en exemple. J’avoue à H. que je ne sais pas comment me détendre avec les enfants qui vont se lever…
Et là elle a l’idée géniale de m’emmener prendre un bain…
H. est à côté de moi, et moi je rentre enfin dans ma bulle. Je me rappelle de I… Que les contractions sont la seule douleur qui veut dire que tout va bien, que bébé sera bientôt dans mes bras … Et à chaque contractions je pense « tout va bien » et je respire par le ventre… Les contractions sont plus espacées, mais plus puissantes. J’entends des voix derrière la porte qui essaient d’être discrètes. Puis plus de voix… Rachid est allé les conduire à l’école. Puis une petite voix et H. qui sort lui parler. Je suis dans ma bulle… J’attends le retour de Rachid pour sortir de l’eau. Quand je sors en arrivant dans le salon je vois Abdelrahman assis à la table, mangeant un tartine. Il est tout calme et passé une seconde de panique, je me rends compte qu’il ne me perturbe pas du tout… Au contraire, le voir me fait repartir dans ma bulle. Je  me couche dans le fauteuil (tiens cette fois-ci les contractions c’est couchée que je préfère…). Il veut venir vers moi et Rachid veut l’en empêcher, mais H. dit de laisser faire…  Il me fait un bisou, puis des carresses, et regarde vers le plafond (?) . Je m’assieds un peu sur la balle et là il me prend les mains. Je le tiens et essaye de relacher mes mains autour de ses poignets… Puis il va jouer avec ses Playmobils, puis il dessine… H. remarque que je pousse un peu et me demande si confirmation. Je reponds « un peu ». Tout s’est accéléré : elle prépare vite de quoi acceuillir Kenza. Rachid assis devant moi. J’ai l’impression d’être à 4  pattes à moitié sur Rachid, mais en fait je suis presque debout. J’ai besoin qu’H. me confirme que je peux pousser… Oui je peux… Ca fait tellement mal que je ne sais pas quand la contraction s’arrête. Je suis mon envie de pousser… Presqu’en continu… Enfin ma fille est là. Elle est contre le sol sur l’alaise prévue à cet effet. Je la prends et me couche dans le fauteuil. J’étais en sueur et heureuse que cela se termine… Abdelrahman n’est pas content: il a crié « non je ne veux pas » quand il a vu sa petite soeur… Mais après s’être reposé avec nous dans notre grand lit, il adoptera sa petite soeur… Et quand les grands rentreront de l’école il se mettra entravers, et dira dans un geste protecteur du bras: « C’est mon bébé »…

– Claire

***
[Note de l’équipe:

Claire – Belgique – 2009

28 Fév

DILBEEK, le 26 avril 2009

Après la naissance si « parfaite » d’Assiya à la maison 2 ans plus tôt, c’est une évidence que je vais rester chez moi encore une fois… Ma prof de yoga est pensionnée, mais elle a acceptée de donner cours à un groupe de sage-femme, kiné, et une doula (première fois que j’entends ce mot-là à l’époque). Elle me dit que je peux venir également… Quelle chance  pour moi !! En plus Heidi ma sage-femme suit le cours aussi !!
Je suis également le cours de Heidi de prépapation dans l’eau… Pour avoir compris comme la préparation peut changer un accouchement, je me passionne pour le sujet…
Comme d’habitude à l’approche de l’évenement, l’ambiance est tendue à la maison. BB en retard comme d’habitude… Chez moi les bbs restent toujours un peu plus, quoique je fasse…Laver les fenêtres, planter les fleurs, marcher, prendre de l’huile de ricin… Chez moi le terme est plus long de quelques jours, c’est comme ça… Pourtant j’espère dès la semaine 36 un démoulage plus rapide… Ma maman garde les plus grands et voudrait savoir QUAND je vais accoucher… (??!!)
Le jours prévu de l’accouchement je dois aller en urgence chez ma dentiste car j’ai fort mal et je dois prenre le bus. Monsieur ne veut pas m’emmener (ou peut-être espère-t-il que le bus va déclencher les contractions?) Et donc je râle d’avoir 3 heures de bus aller-retour… En plus la dentiste veut que je prenne des antibio. Je refuse, je veux allaiter… Je me brosserai les dents avec une goute de he d’arbre à thé sur mon dentifrice bio (et d’ailleurs ça a été très bien comme ça !).
Ma maman garde les plus grands et voudrait savoir QUAND je vais accoucher… (??!!)
J+2 j’ai des contractions le soir et je perds le bouchon muqueux, mais je suis fatiguée… Je m’endors… Le lendemain, après une réconciliation sur l’oreiller, les contractions reprennent…
Quand Heidi arrive je suis dans ma chambre et je me pends à la planche supérieur d’une armoire. Avec les contractions, je me déhanche en m’appuyant sur une armoire à mi-hauteur.  La planche de l’armoire cède (elle n’est pas cassée, mais démise) et Heidi m’installe une écharpe de portage coincée dans l’espace entre le mur et le haut de la porte fermée pour que je puisse continuer à me pendre.
J’ai besoin de bouger, on descend dans le salon. Heidi me laisse faire et regarde un livre que j’ai avec de belles photos de foetus…  Je me pends à la bibliothèque, marche, me déhanche… C’est fatiguant et je m’assieds sur un chaise, face à son dossier pour me relaxer, comme je l’ai appris au cours de yoga… Je ferme les yeux, respire calmement par le ventre… Tiens je n’ai plus de contractions… Je me remets à bouger et elles reviennent… Heidi écoute le coeur du bébé et…  tout va bien. Il bat comme il faut…  Heidi me propose de me masser le bas du  dos et bien que je ne sois pas peruadée je  dis oui… J’ai  bien eu raison, car ca faisait vraiment du bien. Elle expliqua à Rachid comment faire et lui montra la tête du bb qui poussait dans mon dos… Je dois bouger et me repends à la bibliothèque. Les contractions sont plus fortes, je perds du liquide. Heidi me dit d’aller à la toilette et j’y vais. En revenant,j’ai une super contraction, et n’ai que le temps de m’aggripper à Heidi…
On en est  là, quand sonne  quelqu’un à la porte… Heidi et moi on dit qu’on veut personne, et – heureusement –  Rachid va voir… C’est Ineke (ma prof de yoga) en avance sur notre rendez-vous qui arrive comme par miracle juste au bon moment…  « Ineke »…Si Ineke est là, ca ne peut que BIEN se passer… Je m’appuie sur elle et Heidi lui explique que je suis prête, qu’on attend juste que le poche des eaux se rompe.
Ineke me dit « concentre-toi sur ta poche et dis lui de se rompre », ce que je fais… Et elle se rompt…Waow…
Après  j’ai un petit moment sans contraction, on installe ce qui faut pour l’expulsion: Rachid assis sur le fauteuil et moi devant lui accroupie, un genou au sol. J’ai un peu peur car je n’ai plus de contractions. Mais non Ineke est là tout va bien aller… Je pousse un peu et directement des contractions reprennent… Ineke m’aide à me recentrer entre chaque contractions « Adem diep door naar je kind »  (respire profondément vers ton enfant).  Je sens que je dois bouger et je m’accroupis complètement… Position qui libère mon petit chéri… Heidi le réceptionne. Je le prends et me couche dans le fauteuil, il est contre moi, pleure…Il reçoit un essuie sur lui. Ca brûle en bas mais je n’ai pas de déchirure… Ca va passer… C’est le bonheur complet. Heidi nous prend en photo. Cette fois aussi nous attendons pour couper le cordon, expulser le placenta. Et tout se fait à notre rythme et à l’aise…
Merci à mes deux bonnes fées d’avoir été là …

***

[Note de l’équipe:

Claire – Belgique (Dilbeek) – Naissance d’Assiya à la maison – 2007

28 Fév

Dilbeek, avril 2007
C’est mon 3ième enfant et cette fois-ci, j’ai choisi d’accoucher à la maison… Je suis encore frustrée de la naissance précédente à l’hôpital, et je veux être libre de mes mouvements… Je me suis préparée avec le Yoga, comme la fois précédente et j’ai lu énormément aussi des livres comme celui d’Isabelle Brabant « Une naissance heureuse », « La naissance, un voyage » de Muriel Bonnet del Valle et un livre de récit de naissances à la maison « au coeur de la naissance », et d’autres aussi très bons en Néérlandais. Par contre, j’avais jeté à la poubelle la grosse pile de feuilles décrivant toutes les complications possibles lors d’un accouchement, que ma maman avait trouvées sur internet et m’avait données à lire pour me dissuader. Cette pile de « complications » je l’ai jetée dans la poubelle à papier sans la lire, en disant à mon mari: « Ce sont les peurs de ma maman, pas les miennes ».

Ineke, ma prof de yoga, m’a appris le plus important: voir l’accouchement comme un moment merveilleux où chaque contraction  (seule douleur qui veut dire que tout va bien) me rapproche plus de mon bb dans mes bras… travailler avec les contractions pour s’ouvrir et lâcher-prise pour que mon bb puisse faire son entrée dans la vie aérienne en douceur…  Je remercie encore Ineke de m’avoir appris cela… Avant ces cours, je pensais qu’accoucher était juste un mauvais moment à passer… Et je vous assure que la façon de voir les choses influence vraiment leur déroulement !!
Je remercie aussi Heidi ma sage-femme qui à chaque fois m’a accompagnée dans le respect le plus total, qui a toujours eu de bonnes idées aux bons moments, qui m’a donné confiance en moi et  a cru en moi (même quand j’en doutais à la naissance de ma 5ième…)

Voic le récit de la naissance d’Assiya, écrit quelques jours plus tard…

Le 26 avril 2007, la sage-femme de l’hôpital et la gyneco décident sans nous demander notre avis de provoquer l’accouchement le lendemain à 7h du matin. Fatiguée d’attendre son arrivée prévue 8 jours plus tôt, fatiguée d’être « prête » depuis un mois, je n’ose pas les contredire, toute impatiente que je suis de voir enfin ma fille. Mais dans le voiture qui nous ramène à Dilbeek je prends conscience de ce que « provoquer » à l’hôpital veut dire: la dose de leur hormone synthétique, des contractions tellement douloureuses que souvent le recours à la péri est demandé, et par là même une naissance naturelle et physiologique non respectée… Non merci !!
Donnons un petit coup de pouce à la nature… J’ai eu droit à un stripping à l’hôpital, et MA sage-femme (Heidi)  me propose des granulés homéopathiques.
Le soir lorsque les enfans sont partis chez ma maman en vue de mon hospitalisation, je pars avec Rachid faire une promenade, et pour qu’assiya appuie bien sur mon col (et fasse démarrer la production des hormones indispensables aux contractions) je cours une partie du chemin. Les passants nous regardent, complètement ébahis de voir courrir une femme aussi enceinte que moi…
De retour à la maison, je suis censée faire ma valise, mais impossible… Blocage: je ne veux pas faire ma valise pour l’hôpital.
Par contre je rédige mon plan de naissance, histoire que soit bien clair ce que je désire. A peine terminé, je ressens les premières contractions: il est 22h environ… J’ai de l’espoir, mais je ne suis pas encore sûr car ca fait plusieurs semaines que j’en ai de temps en temps, mais qui s’arrêtent au bout de qques heures. Alors je marche en rond dans le salon, de temps en temps je m’accroupis, caresse  mon ventre pour l’encourager, et parle à Assiya pour lui dire qu’il faut sortir ce soir pour éviter l’hôpital …
23h, Rachid me demande si je ne vais pas dormir. J’ai déjà installé la protection sur le fauteuil et m’apprête à passer l’aspirateur en vitesse. Il me l’enlève des mains et passe un balai en me demandant si je ne suis pas folle de vouloir aspirer à cette heure-là. En installant un second drap sur le fauteuil, je réponds « Si on veut que ca arrive, il faut y croire ». Il est fatigué. je lui dis qu’il peut aller dormir et que je le réveillerai si nécessaire.
Jusqu’à 1h30 je « travaille » toute seule, dans la pénombre rosée de ma lampe à sel. Les contactions sont régulières et suffisamment douloureuses pour penser que c’est le grand jour. J’appelle Heidi et ensuite je n’ai plus de contractions pendant 10 min… Elles reprennent et Heidi arrive pour se faire une idée. C’est bien parti… 3 cm d’ouverture. Je lui dis que  je suis contente et nous rions… Je la rappellerai plus tard, elle va prévenir sa stagiaire Laurence. Elle me rappelle que je peux mettre une compresse chaude sur mon ventre pour soulager, et ca me fait penser, qu’à défaut de compresse, je peux essayer la douche. Mais à ce moment-là elles sont toute à fait gérables avec la « buikademhaling » – respirations par le ventre. Par contre, je me dis que si je ne suis qu’à 3 cm, ca passera  le temps de me relaxer dans le douche. Donc je vais à l’étage et douche mon ventre. Je finis par mettre le bouchon de la  baignoire – « toute cette eau qui s’en va » pensais-je. Lorsqu’elle est remplie, je me couche du côté droit.
Et là je suis complètement relaxée, presque prête à dormir. Quand la contraction arrive, je respire avec le ventre et tout va bien. J’imagine mon col comme une fleur qui s’ouvre au soleil… Je change de côté, puis je sens qu’il faut que je sorte pour réveiller Rachid. Je sors entre deux contractions, et je reste un peu près de lui et lui dit que j’ai besoin de lui, qu’il doit s’habiller. Je sens qu’il faut redescendre maintenant car bientôt je ne saurai plus. depuis ma sortie du bain elles sont plus fortes et rapprochées.
On va dans le fauteuil: Rachid est assis et moi à 4 pattes, ma tête sur lui. Dans ses bras j’ai l’impression que cela fait moins mal. Je dois faire appel à la respiration  » V van Vader hademhaling »  .  Mais dès le 4ième V, je sens que ça pousse et j’ai envie de pousser. Je me dis alors qu’il  faut appeler Heidi pour savoir si j’ai bien 10 cm d’ouverture. Il est environ 3 h. Le temps qu’Heidi arrive et me regarde « Ze duwt met haar hoofd » (elle pousse avec sa tête) et installe vite vite ce qu’il faut devant le fauteuil, je peux commencer à pousser. J’oublie le V ademhaling et pousse en gémissant. D’abord la poche des eaux se fend, puis elle « éclate ». Je demande à Rachid de se rasseoir sur le fauteuil. « Je veux toi » c’est tout ce que j’arrive à dire. Je suis accroupie, j’appuie ma tête sur la jambe de Rachid entre les contractions, et la relève pendant. Je m’accroche à ses vêtements et je l’ai même mordu, paraît-il… Je sens que je dois changer de position, et mets le genou droit par terre.
Très vite Heidi me dit que je peux sentir la tête et je fais rire tout le monde avec un « ho » plein de bonheur  étonné. Heidi me dit de pousser doucement et puis ca y est: la tête est là, ensuite « tu peux la prendre ». « Ma chérie, ma chérie » je répète en la mettant contre mon ventre. Je me relève puis m’installe dans le fauteuil… « Salam aleikoum » lui dis-je alors. On lui met  un essuie de bain sur le dos en couvrant aussi sa tête. Il est 4h25. Elle ne pleure pas  et se rendort dans mes bras. Heidi ne semble pas inquiète et Assiya respire… Nous attendons que le cordon cesse de battre et Rachid le coupe. Nous attendons que le placenta se détache et que j’aie des contractions pour l’expulser.Pendant ce temps Heidi change l’essui d’Assiya qui est mouillé pour lui mettre un sec. Enfin le placenta est prêt à sortir et en une poussée, il « vole » dehors. Heidi me demande si je veux le voir. Oui, je n’en ai encore jamais vu et elle nous l’explique. Elle remarque qu’il est en très bon état et qu’Assiya ne devait pas être si en retard que  ça. D’ailleurs elle est encore pleine de vernix…
Ensuite Heidi m’inspecte et pas de déchirure, elle me débarbouille… Pendant que Laurence s’occupe d’Assiya. Je demande mes lunettes pour pouvoir suivre les opérations de mes yeux. Elle me paraît toute petite, mais elle fait 3kg925… Après une petite douche Rachid, Assiya et moi allons nous reposer dans notre lit…

***

[Note de l’équipe :

Ses autres récits sont ici : – Naissance respectée de Kenza – Belgique, 2012‏, – Belgique – 2009, – une fausse couche tardive, 2008, – # 187 Claire – Belgique – 2004.

Ingrid – Bruxelles – 1988

1 Fév

Je m’appelle Ingrid.

Les faits que je rapporte remontent à 25 ans. C’était à Bruxelles où j’habitais alors. Je suis sage-femme. Alors, je savais très bien ce que je ne voulais pas, et ce que je voulais, et les moyens pour y parvenir.

Pour les deux premiers, j’avais accouché à la Maternité, celle où je travaillais à l’époque. En arrivant à la dernière minute, j’avais échappé à la perfusion obligatoire et à l’ocytocine intraveineuse, et aux pressions pour accepter la péridurale. Et puis, j’avais fait une grande partie du travail dans ma baignoire et dans mes coussins. J’étais arrivée un peu beaucoup trop tard pour que mes collègues puissent faire autre chose que me tenir la main en m’encourageant. Ce qu’elles ont très bien fait d’ailleurs. Elles étaient si heureuses d’assister à une naissance normale, vécue, préparée…

Pour la troisième, donc, je ne voyais pas l’intérêt de courrir à la Mat et d’entendre une bonne âme décréter que « accoucher sans péridurale, c’est du masochisme morbide ».  J’ai trouvé la dernière sage-femme qui faisait encore des accouchement à domicile à Bruxelles. Il y a une relève depuis. Bonne nouvelle. J’ai fait mon travail dans une petite piscine, bien chauffée, en chantant des sons « A-aum » aussi fort que j’en avais envie, sans craindre de faire paniquer une primipare dans la chambre d’à côté. Le pied! Je suis entrée dans un état second. Je n’ai jamais fumé de joint, mais ça doit être proche, sauf qu’ici, on ne « part » pas, on s’habite intensément.

La suite est floue, mais très présente, dans un déluge d’une telle puissance que je me suis sentie balayée, puis, cela s’est calmé et j’ai posé les yeux sur ma petit fille, son visage, son regard… Là je n’ai plus de mots. Comment décrire cette immense vague d’amour … qui dure encore, d’ailleurs 🙂

Précision : quelques mois avant sa naissance, j’avais donné ma démission comme sage-femme hospitalière. Je ne voulais plus être complice de la violence faite aux femmes, ni m’enrager contre certaines femmes qui se soumettent, ne s’informent pas, ne se préparent pas « car maintenant, on a la péridurale ». J’appelle de mes voeux une (r)évolution obstétricale qui se fasse avec toutes les personnes concernées : futurs et nouveaux parents, d’abord, bien sûr, et les différentes professions qui s’y impliquent et qui, toutes, peuvent apporter leur pierre.